Confidences : Jean-Jacques Goldman et les femmes
Confidences
Entre charme, respect et réflexion, Jean-Jacques Goldman aborde les voix, les amours, l’inspiration féminine et leur place dans sa vie et sa musique.
Certaines interviews publiées dans la presse jeune du début des années 80 sont probablement apocryphes, et n'ont donc pas été pris en compte dans les échanges retenus ci-dessous.
Jean-Jacques Goldman : Celui que je n’aime pas est celui qui se dit être marginal en étant très intégré au système : celui qui travaille à mi-temps dans une administration, qui fume un joint le soir avec 3 ou 4 personnes et qui lit Libé, car c’est celui qui trimballe le plus de lieux communs. De même avant, il fallait qu’une femme soit vierge jusqu’à son mariage, ou… celui qui n’avait pas "fait l’Armée" n’était pas un homme. Le marginal sécrète de nouveaux lieux communs aussi stupides, du genre "U.S. go home" que ceux des censeurs d’avant 68 avec leur "Travail – Famille – Patrie". Ce sont les mêmes. Leur connerie porte parfois des barbes et des cheveux longs mais elle persiste. C’est contre cette marginalité là que je lutte, d’autant plus qu’elle est très présente dans mon entourage familial.
Jean-Jacques Goldman s’explique (Numéro 1, mai 1984, propos recueillis par Didier Varrod)
Bernard Alès : Vous aviez dit que vous étiez sans ambition. Aujourd'hui vous êtes régulièrement en tête des hit-parades. Comment vivez-vous le succès ?
Jean-Jacques Goldman : Très bien. C'est très agréable. Sans ambition, c'est un peu faux. J'ai des ambitions qui sont très précises, mais qui ne sont pas des ambitions de succès, de notoriété et de reconnaissance. Mon ambition, c'est de progresser musicalement, dans l'écriture, dans l'enregistrement, de faire de beaux spectacles. Mon ambition a toujours été là. Elle n'a jamais été liée à la notoriété. Je n'ai jamais rêvé d'être adulé des foules. Cela m'arrive et je suis très content. De même, je n'ai jamais rêvé d'être milliardaire, ne de vivre avec les femmes les plus belles du monde. Mais faire de la musique sans contrainte, sans arrière pensée de succès, oui.
Paroles et Musique : Et vous prétendez que votre courrier recèle peu de "lettres d'amour" !
Jean-Jacques Goldman : Mais c'est vrai. En revanche, 95 % des lettres que je reçois émanent de femmes. Sans doute parce que les hommes n'écrivent pas : je suis sûr que les joueurs de football ne reçoivent pas de courrier.
Paroles et Musique : Pensez-vous toujours que le rock soit, comme vous l'avez déclaré un jour, "un mouvement fondamentalement de droite" ?
Jean-Jacques Goldman : Je pense qu'il y a beaucoup de caractéristiques de droite dans le rock : par exemple, le rapport avec les femmes ou le rapport avec la foule et son fanatisme, les collusions avec l'argent et le pouvoir - les Beatles décorés par la Reine, Springsteen, chanteur favori de Reagan... - etc.
Jean Théfaine : Ta femme idéale, c’est qui ?
Jean-Jacques Goldman : La mienne, pour l’instant. En fait, la femme idéale je n’y crois pas.
Jean Théfaine : Une jolie femme t’invite à dîner. Le plat qu’elle te sert est celui que tu détestes le plus. Tu fais quoi ?
Jean-Jacques Goldman : Je lui dis que son plat est dégueulasse et je lui demande si elle n’a pas autre chose à me proposer.
B comme Beauté : Ça ma paraît être très important dans la vie. Beaucoup plus qu'on ne le croit. Il y a une grande injustice à ce niveau, mais je suis persuadé que cela sert ceux qui la possèdent. Une femme laide n'aura pas la même vie qu'une femme belle. Tout comme un homme laid, quel que soit ses talents, n'aura pas la même vie que quelqu'un de séduisant. C'est extrêmement injuste mais c'est comme ça.
Spécial Jean-Jacques Goldman (Star Club Hors-Série n° 4, mai-juin 1989)
Jean-Jacques Goldman : Ici, c'est chez moi. C'est là que je compose et écris. A la maison, c'est l'univers de ma femme et de mes enfants, le mien aussi, certes, mais je passe ici tout le temps de mon élaboration. Il m'est nécessaire d'être seul, de pouvoir faire le bruit que je veux, m'endormir ou me réveiller à n'importe quelle heure. C'est mon atelier, en somme. On appelle ça un "home studio" dans le jargon des musiciens de rock, et si vous ne voyez rien à côté de mes outils de travail, c'est parce que je suis aveugle à ces choses-là : décor, couleurs, moquette ou pas, etc.
Jean-Jacques Goldman : A 12, 13 ans, ils me stupéfient par leur humour, leur connaissance du monde, leur distanciation. Ils ont fait du "Père Noël est une ordure" leur film-culte, parce que ce film démasque toutes les pudibonderies, les fausses attitudes. Et j'observe aussi, parmi celles et ceux qui m'écoutent, une compréhension, voire une compassion à mon égard qui vient contrebalancer leur humour dévastateur.
Philippe Labro : Vont-ils, vont-elles autant vous aimer à mesure que vous vieillissez ? Et sentez-vous, comment dire, un affaiblissement de votre "électorat" ?
Jean-Jacques Goldman : Mais oui, bien sûr, oui !
Philippe Labro : Et cela ne vous attriste pas ?
Jean-Jacques Goldman : Ce n'est pas une tragédie ! C'est un déclin absolument inexorable : vous pouvez conserver un public de base qui va vieillir avec vous, mais vous perdrez celui qui se renouvelle, les 13-17 ans qui arrivent. Il faut être sérieux : vous ne vous imaginez tout de même pas que, sous prétexte que j'avais plus de succès que Léo Ferré entre 1980 et 1990, j'aie pu croire que j'avais plus de talent que lui ?... J'avais ma jeunesse, et la jeunesse s'identifiera désormais, peut-être, moins facilement à moi. Je vais rejoindre les 99 % des chanteurs dont le succès est basé sur leur travail, et je quitterai le 1% des "élus". Ça se passe anormalement doucement, mais ça se passe. Une espèce de grâce, d'aura, va se perdre.
Philippe Labro : Ça vous manquera ?
Jean-Jacques Goldman : Je sais cela depuis toujours. Ça ne peut pas me manquer. Au début, quand j'ai vu ce cirque autour de moi, je me suis posé la question: Que fais-je ? J'y vais, ou j'arrête? Nous n'en avions jamais parlé, avec ma femme, puisque nous ne l'avions jamais envisagé. Je me suis dit : Comment ? Je refuse un statut auquel tous mes amis musiciens rêvent d'accéder ? De quel droit ? Et puis, aussi : Vais-je me retrouver dans la position, plus tard, du type qui sort les coupures de presse et dit : "Vous voyez, si j'avais voulu, j'aurais pu..." ? Alors, j'y suis allé. Mais ce statut de chanteur - vedette allait à l'encontre de mon éducation. Le respect que j'avais pour mon entourage familial m'a même interdit de les inviter la première fois que j'ai "fait" l'Olympia !
Jean-Jacques Goldman : [à propos de sa popularité] Avec Catherine, on le vit avec distance. On a le même regard sur le phénomène : étonnement, intérêt, mais détachement et amusement, en sachant que, fondamentalement, ce n'est pas important.
Philippe Labro : Qu'est-ce qui est important, pour vous deux, alors ?
Jean-Jacques Goldman : Ce qui arrive à tout le monde. Les vrais problèmes. Les relations avec autrui. Comment nous allons vieillir ensemble.
Evelyne Pagès : A ceux qui nous écoutent aujourd'hui - qui vont nous dire "ah, c'est bien, Jean-Jacques Goldman, il a fait des études poussées", aux parents qui vont dire à leurs enfants, "tu vois, Jean-Jacques Goldman, que tu admires tant, mon petit chéri, il a fait des études poussées", qu'est-ce que vous diriez, vous ?
Jean-Jacques Goldman : Je dirais qu'un garçon n'a pas besoin d'études, contrairement à ce que disent les gens, que les filles n'en ont pas besoin et qu'il faut pousser les garçons. Je crois que c'est tout à fait le contraire. Un garçon, s'il veut s'en sortir, il peut toujours s'en sortir, et par contre, il faut absolument pousser les filles dans leurs études, parce qu'elles ont besoin d'un métier. Il y aura un moment, entre vingt-cinq et trente ans, ou trente-cinq ans, où elles seront bloquées, par leur famille, par leurs enfants, et donc elles auront besoin, à ce moment-là, de s'appuyer sur un bagage. C'est mieux, quand même, d'être médecin pour travailler à mi-temps, d'être psychologue, ou d'être prof... Le diplôme, c'est quand même la porte pour l'aménagement du temps, pour une femme. Moi, je pousserai beaucoup mes filles à faire des études ; par contre, un garçon, non. Il peut s'en sortir en vendant des jeans sur un marché, il y a des tas de métiers où il est plutôt mal vu de faire des études. Pour devenir directeur d'une maison de disques ou preneur de son, ou musicien, ce sont des choses qui s'apprennent à côté. A la limite, un diplôme, ça peut plutôt les perturber. Quand on a un diplôme de vétérinaire, en général, on devient vétérinaire. Peut-être que ce n'est pas ce que l'on avait envie de faire... C'est peut-être plutôt une contrainte que l'on s'est tracée qu'une liberté que l'on s'est ouvert.
Evelyne Pagès : Vous considérez que les différences entre les sexes - vous en parlez dans une chanson : "ces différences qui deviennent des chances"...
Jean-Jacques Goldman : Il y a vraiment une grande différence. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ce sont vraiment les femmes qui font les enfants.
Evelyne Pagès : Ça, j'avais remarqué ! Il faut quand même être deux. Vous parlez des différences...
Jean-Jacques Goldman : C'est beaucoup plus rapide pour nous ! Beaucoup plus rapide !
Evelyne Pagès : Mais c'est tellement agréable pour nous, vous savez... Vous en avez combien des enfants ?
Jean-Jacques Goldman : J'en ai trois.
Evelyne Pagès : Que des filles ?
Jean-Jacques Goldman : Non, j'ai deux filles et un garçon.
Evelyne Pagès : Bon, alors les filles...
Jean-Jacques Goldman : Les filles, je les emm... je les embêterai au niveau des études.
Evelyne Pagès : Oh les pauvres ! Alors, le garçon, il peut vendre des jeans sur un marché...
Jean-Jacques Goldman : Oui, parce qu'il aura du temps, ils peuvent s'investir à 100 %. Il y a une grande inégalité physiologique. Il n'y a pas les choix fondamentaux que doit faire une femme à 30 ans.
Grand Format (RTL, 29 juillet 1991, Evelyne Pagès)
Animateur : 20 heures sur M40. Bienvenue à tous. Bonsoir. Jean-Jacques Goldman avec nous comme Thierry Hasard l'a été la semaine dernière. Jean-Jacques Goldman, pendant une heure, c'est un grand mot parce que nous, à M40, radio qui débute avec quelqu'un comme toi, Jean-Jacques, c'est quand même un privilège. Donc je te remercie d'être ce soir avec nous. Et d'une. Et puis d'autre part, on va parler un peu de tout ce soir, on va écouter un peu ce que tu aimes, on va parler un petit peu de ce que tu n'aimes pas aussi, parce que tu as le droit de le dire. Et puis on va surtout parler de ta collaboration actuelle avec Carole Fredericks et Michaël Jones qui est quand même le fer de lance actuel de ta carrière. Alors, pourquoi une nouvelle carrière à trois ? Est-ce que c'est un intermède ? Est-ce que c'est une envie de faire des trucs ensemble ? Est-ce que c'est une nouvelle facette du compositeur Goldman ?
Jean-Jacques Goldman : Dans toute vie professionnelle d'abord, et en particulier musicale, il y a plusieurs phases. Moi j'ai eu une phase bals, groupes de clubs, des choses comme ça, ensuite il y a eu une phase Taï Phong, c'est à dire groupe et discographie puisqu'il y a eu trois albums. Ensuite il y a eu une phase où j'ai fait de la chanson en français tout seul. Et puis là, il y a une phase où je fais de la chanson en français avec deux complices.
Animateur : Est-ce que c'est un truc qui va durer ? Est-ce que vous avez d'autres projets ensemble ou est-ce que c'est une collaboration "tiens on va faire un album ensemble" ?
Jean-Jacques Goldman : Bah c'est quelque chose qui dure depuis longtemps puisque je connais Michaël depuis plus de 10 ans, Carole depuis plus de 6 ans. Donc c'est devenu un peu plus voyant avec l'album "Fredericks-Goldman-Jones", mais c'était déjà une longue histoire. Et je pense que ce n'est pas une histoire qui va se terminer comme ça.
Animateur : Et qu'est-ce qui t'a poussé à choisir spécialement ces gens-là ? Parce que je suppose que tu as dû travailler avec beaucoup de pointures au niveau artistes, et pas seulement pour Michaël Jones et pareil pour les choristes.
Jean-Jacques Goldman : Oui mais c'est toujours la question qu'on se pose quand on choisit un ami, un amant, une femme ou des gens comme ça. On ne sait pas pourquoi. C'est un ensemble, parce que c'était eux, parce que c'était moi, comme dirait l'autre.
Rencontre avec Jean-Jacques Goldman (M40, le 31 janvier 1992)
Laurent Boyer : Qu'est-ce qui t'a séduit chez ta femme ?
Jean-Jacques [après une longue hésitation] : C'est difficile. Je ne sais pas si on se marie parce qu'on a envie de vivre avec quelqu'un ou parce qu'on a l'impression qu'on ne peut pas vivre sans. C'est bizarre.
Laurent Boyer : Une phrase d'auteur.
Jean-Jacques Goldman : Je sais pas.
Laurent Boyer : Après 18 ans de mariage, tu en penses quoi du mariage ?
Jean-Jacques Goldman : Ouh la la ! [Il porte sa tasse de thé à la bouche, mais en renverse]
Laurent Boyer : T'en penses que ça fait couler mon thé sur ma chemise ?
Jean-Jacques Goldman : Vous venez de voir un acte manqué en direct ! [rires de Laurent Boyer] Les psychiatres sont en train de prendre des notes.
Laurent Boyer : Parce que tu as écrit quelques chansons sympa sur le sujet, je trouve.
Jean-Jacques Goldman : Du mariage, on peut en parler pendant des heures. Il fut un temps où le mariage était plus une espèce d'association où chacun tenait son rôle, et une association qui était extrêmement tenue pour des raisons pratiques et économiques. L'amour était quelque chose de presque subsidiaire. C'était un petit plus, mais avant tout, un homme cherchait une femme pour qu'elle soit à la maison, la femme avait besoin d'un homme pour survivre, il fallait faire des enfants, il fallait laver le linge. C'était une association qui fonctionnait comme ça, pour toutes ces raisons. La preuve, c'est qu'il y avait beaucoup de marieurs, par exemple, dans certaines religions, et ces mariages là fonctionnnaient très bien. L'amour était un luxe. Maintenant, on arrive à un moment où il y a des machines à laver automatiques, où les femmes travaillent, où on a des micro-ondes avec des plats congelés, et on n'a pas besoin l'un de l'autre. Il y a même la télé quand on s'ennuie. La seule chose qui fait tenir un mariage, c'est l'amour. Là, ça devient plus compliqué.
Laurent Boyer : Il y a une redéfinition des fonctions, et des individus l'un par rapport à l'autre. L'homme par rapport à la femme.
Jean-Jacques Goldman : C'est à dire, il y a une absence de fonctions, parce que moi, je peux laver mon linge, et elle n'a plus besoin de mon salaire. A partir de ce moment là, pourquoi on est ensemble ? Parce qu'on veut, parce qu'on a envie. C'est juste le désir d'être ensemble.
Laurent Boyer : Merci d'avoir répondu à ces petites questions de généralité sur le couple.
Fréquenstar (M6, 5 décembre 1993, propos recueillis par Laurent Boyer)
Jean-Jacques Goldman : L'idée de la famille de sang est quelque chose qui ne me tient pas particulièrement à coeur. Le fait d'être du même sang, ne veut à mon sens rien dire. En fait, j'ai une version affective assez large de l'idée de famille. Quand à ma famille directe, femme et enfants, elle représente un élément très conventionnel de mon existence, voire prédéterminé. Vivre en famille doit être aussi invivable que de vivre sans ! C'est ainsi. Les gens qui n'ont pas connu l'expérience de la paternité ou de la maternité semblent éprouver un manque. Le fait d'être père, à son tour, est quelque chose qui fait terriblement vieillir, c'est comme la calvitie !
Jean-Paul Germonville : Un autre titre, "Muraille", évoque l'usure d'un amour, d'un certain monde du travail.
Jean-Jacques Goldman : Le genre de chanson qu'on ne peut écrire qu'à 46 ans... pas à 20 !
Jean-Paul Germonville : Un sujet d'actualité.
Jean-Jacques Goldman : Un monde se termine alors qu'on a cru qu'il durerait toujours. La mine était même devenue une culture qui se transmettait de génération en génération. On ne peut pas vivre sans cette idée permanente d'éphémère.
Jean-Paul Germonville : Un sentiment qu'on n'a pas à 20 ans ?
Jean-Jacques Goldman : Non, je ne crois pas. A cet âge-là, quand on est amoureux, on est absolument persuadé que ça durera toujours. Si quelqu'un dit "Regardez les statistiques", la réponse est toujours la même : "Nous, c'est pas pareil !" Les statistiques ne font rien croire à 20 ans.
Jean-Paul Germonville : La vie se charge d'apprendre !
Jean-Jacques Goldman : L'expérience, le constat de certaines vérités.
Jean-Paul Germonville : Et le monde tourne mal !
Jean-Jacques Goldman : Je trouve qu'il va plutôt mieux qu'avant. Ça peut paraître cynique, mais la mortalité infantile baisse, la faim dans le monde baisse. L'Inde arrive presque à l'autosuffisance alimentaire. Les démocraties ne perdent pas de terrain. Le monde a toujours été très mal. Le statut de la femme même s'il est épouvantable, a tendance à s'améliorer plutôt que régresser. C'est lent mais on ne va pas vers un pire. Il y a moins de guerres, nous sommes une génération qui ne l'a jamais connue. La première, probablement, dans l'Histoire de France.
Jean-Paul Germonville : L'éclairage médiatique se fait surtout en direction des endroits où ça va mal.
Jean-Jacques Goldman : En effet, on égorge des femmes et des enfants à une heure d'avion de chez nous. Effectivement, ça ne change pas grand chose pour eux de savoir que globalement, on va vers un mieux.
Le Figaro : Vous avez le sentiment d'avoir raconté beaucoup d'histoires ?
Jean-Jacques Goldman : Pas d'avoir raconté des histoires mais d'y avoir cru – mais comme tout le monde, je crois, si vous allez dans une mairie un samedi après-midi, vous allez voir neuf mariages. Si vous dites aux neuf jeunes couples, en région parisienne, deux mariages sur trois finissent par se séparer, les neuf vont répondre. « Oui, mais, nous, ce n'est pas pareil ». Alors que, statistiquement, quinze ans après, il y en aura six sur les neuf qui seront séparés ou en mauvais état, tous croient le contraire sur le perron de la mairie.
Jean-Jacques Goldman : "Forcément je tourne en rond" (Le Figaro, 29 septembre 1997)
Le Figaro : Alors, justement, quand votre popularité a explosé, au début des années 80, quand vous aviez déjà plus de trente ans, l'adulation des adolescentes ne vous tournait pas la tête ?
Le Figaro : Non J'étais trop vieux, j'étais marié, j'avais déjà deux enfants.
Le Figaro : Quel effet cela vous a fait ?
Jean-Jacques Goldman : C'est ce qu'il y a de plus précieux. Maintenant, je fais un métier – je suis auteur de chansons, compositeur, arrangeur, musicien, interprète. A cette époque-là, je ne faisais pas un métier, c'était une chance inouïe de vivre ces relations affectives qui dépassent la raison. On a l'impression qu'on est les Beatles et Elvis Presley réunis. II y a des artistes qui ont une magnifique carrière sans jamais connaître ça.
Le Figaro : Et comment votre femme l'a pris ?
Jean-Jacques Goldman : Bien, je crois.
Jean-Jacques Goldman : "Forcément je tourne en rond" (Le Figaro, 29 septembre 1997)
Le Figaro : "Sache que je", le premier titre de votre album à passer à la radio, est une chanson plutôt désenchantée, assez dubitative quant à l'amour.
Jean-Jacques Goldman : Je ne suis pas d'accord. Le refrain est une déclaration d'amour. Simplement, il explique pourquoi il ne va pas dire : Je t'aime. C'est une chanson sur la forme mais pas sur le fond. Il ne dit pas qu'il y a mourir dans le fait d'aimer, mais qu'il y a mourir dans "je t'aime", qu'il y a du temps qui traîne dans je t'aime. Ce n'est pas douter de l'amour.
Le Figaro : Oui, mais il y a aussi sur ce disque "Les Murailles", qui est une chanson sur les illusions perdues dont l'amour.
Jean-Jacques Goldman : "Les Murailles" parlent des neuf couples de tout à l'heure devant la mairie, du fait que le mot «toujours » n'existe pas. Je ne trouve pas que ce soit une mauvaise nouvelle.
Le Figaro : Ah bon !
Jean-Jacques Goldman : "Longtemps" ça peut exister. Le fait de savoir que "toujours" est une vue de l'esprit, ça donne un petit peu plus de précieux à "maintenant".
Le Figaro : Rien ne dure toujours ?
Jean-Jacques Goldman : L'affection, l'amitié.
Jean-Jacques Goldman : "Forcément je tourne en rond" (Le Figaro, 29 septembre 1997)
Philippe Cornet : Votre musique est un langage spirituel mais détaché de tout prosélytisme.
Jean-Jacques Goldman : La religion n'a rien à voir avec la question de Dieu, tout le monde sait que la religion, c'est des règles de base instaurées pour faire passer des règles sociales qui font peur aux gens. Mais pour les personnes qui sont, disons, autodisciplinées par l'éducation et la connaissance, les problèmes spirituels ne se développent pas forcément dans le cadre d'une religion, ils n'ont pas besoin de cela pour ne pas voler ou pour ne pas désirer la femme du prochain. Ce qui reste à prouver d'ailleurs [rires].
Goldman, le passeur (Le Vif / L'Express, 3 octobre 1997, propos recueillis par Philippe Cornet)
Solo : Plus que de la nostalgie, votre album "En passant" m'évoque la mélancolie et la définition qu'en donnait Freud : "la perte s'est bien produite, mais on ne parvient pas à savoir avec précision ce qui a été perdu". Puis, dans la chanson "Quand tu danses", arrive cette phrase terrible : "J'ai fait la liste de ce que l'on ne sera plus". Que ne serez-vous plus ?
JJG : "Quand tu danses" est une histoire très claire entre un homme et une femme. Bien sûr, pour écrire cette chanson, il faut avoir vécu ces histoires. On ne peut pas écrire cela à 20 ans. A 20 ans, on ne fait pas la liste de ce qu'on va être : on a juste l'impression de vivre une histoire qui ne finira jamais. On n'écrit pas les mêmes choses à 20 ans qu'à 46 ans. C'est une question qu'on se pose après, au cours de son existence. Se demander : une fois que l'amour est parti, qu'est-ce qu'on devient ? Après avoir été tout, est-ce qu'on devient rien ? Quand on a touché la peau de quelqu'un, est-ce qu'on devient un ennemi ? C'est dommage. Quel est le statut des gens qui se quittent ?
Portrait (Solo n°2, novembre / décembre 1997, propos recueillis par Lilianne Roudière)
Virginie Carton : Vos chansons parlent souvent d'amour et en même temps de séparation et de solitude.
Jean-Jacques Goldman : Il y a souvent des départs dans les histoires d'amour, non ? Beaucoup de route...
Virginie Carton : Chaque chanson vous rappelle un souvenir de votre vie ?
Jean-Jacques Goldman : Un état d'esprit.
Virginie Carton : Les artistes pour lesquels vous travaillez, vous les choisissez comment ?
Jean-Jacques Goldman : Les femmes ?
Virginie Carton : Ce sont des femmes qui ont une voix. C'est d'abord la voix qui vous intéresse ?
Jean-Jacques Goldman : Oui, la voix, que la voix. (sourire)
Virginie Carton : Au début de votre carrière, on lisait dans les journaux de fans que votre femme s'appelait Catherine.
Jean-Jacques Goldman : Je n'ai pas de femme.
Laurent Boyer : Une femme sexy, c'est quoi pour toi, Jean-Jacques ?
Jean-Jacques Goldman : C'est terrible. Les gens, ils répondent à ça ? [Rires de Jean-Jacques Goldman]. Allez, passe.
Laurent Boyer : Tu préfères quitter ou être quitté ?
Jean-Jacques Goldman : Ni l'un, ni l'autre.
Laurent Boyer : Ça se déclare, ça se déclame ou ça se tait ?
Jean-Jacques Goldman : Ça se fait.
Laurent Boyer : Quand on aime très fort, on peut rester amis après ?
Jean-Jacques Goldman : Bonne question, j'en ferais bien une chanson !
Laurent Boyer : La phrase qui tue l'amour, selon toi ?
Jean-Jacques Goldman : C'est la phrase où tout à coup, tu te rends compte que t'as pas vécu la même histoire, tu vois, le malentendu.
Laurent Boyer : Parler d'amour, ça te gêne ?
Jean-Jacques Goldman : Ouais !
Laurent Boyer : Merci Jean-Jacques.
Laurent Boyer : La femme que tu aimes te demande de prendre une année sabatique pour te consacrer à elle. Comment réagis-tu ?
Jean-Jacques Goldman : Je me dis qu'elle ne m'aime pas, elle.
Isabelle Giordano : "Sache que je", la célèbre chanson, est-ce qu'on peut savoir à qui elle s'adresse ?
Jean-Jacques Goldman : Mais elle s'adresse pas à quelqu'un, ah oui, si, elle s'adresse à quelqu'un, oui.. Je sais pas, j'ai pas réfléchi à ça ! Elle s'adresse aux personnes à qui je suis susceptible de le dire. Donc je préviens d'avance que je ne le dirais pas. Mais en fait, le thème de la chanson, c'est pas vraiment ça, le thème c'est : est-ce qu'on peut dire qu'on est amoureux de quelqu'un avec les mots "je t'aime". C'est ça la question. A mon avis, non, parce que les mots sont plus... je crois que si je disais ça, ça ferait éclater de rire. Mais donc le sentiment est là, les mots sont plus là pour le dire. Je dirais donc "sache que je", mais je sais pas à qui!
Isabelle Giordano : Est-ce que vous avez l'impression de devoir quelque chose à vos parents, musicalement ou dans d'autres domaines. Vous vous sentez redevable de quelque chose.
Jean-Jacques Goldman : Immensément, exclusivement, totalement même pathologiquement aussi. J'arrive à peine à 45 ans à me dire mais ça va vous faire sourire car je suis sûr que vous avez beaucoup réfléchi à ca, comme n'importe quelle femme en particulier, de se dire, tiens je fais un acte qui n'a pas été programmé pour que je le fasse, quoi ! C'est tout de même terrassant, quand on arrive même à mon âge de se dire, tout ce que j'ai fait, je l'ai quasiment pas choisi, je n'ai fait que ce qu'on a programmé pour que je le fasse. Cette phrase est à mon avis pas tout à fait correcte mais elle est compréhensible. Voilà, donc on leur doit tout et en même temps, et on leur doit aussi d'être si peu ce que nous aurions pu être.
Le Journal des Spectacles (Europe 1, 19 juin 1998, propos recueillis par Isabelle Giordano)
Joëlle Lehrer : Préférez-vous écrire une chanson comme "Sache que je" plutôt que de dire "Je t'aime" à la femme de votre vie ?
Jean-Jacques Goldman : "Sache que je" lui explique pourquoi je ne lui dis pas "Je t'aime" et que cela n'empêche pas... C'est une réponse au fait que je n'ai dit "Je t'aime" dans aucune de mes chansons. Beaucoup de gens me demandent pourquoi je ne fais pas ou peu de chansons d'amour. Il est souvent question de fin d'amour, d'amour fini (rires) mais cela veut dire qu'il y en a eu. J'ai un peu de mal à écrire "You are the sunshine of my life".
Joëlle Lehrer : Vous n'êtes pas un expansif ?
Jean-Jacques Goldman : Je trouve que ces mots sont tellement dévoyés. Michael Jackson qui dit [il prend la voix de M.J.] : "I love you!" ou Carl Lewis qui dit la même chose. Moi, je ne peux pas le dire. Je ne pense pas la même chose qu'eux. C'est comme s'ils s'étaient accaparés ces mots et les avaient vidés de leur sens.
Joëlle Lehrer : Dans cette chanson, vous semblez un peu méfiant, un peu parano en amour.
Jean-Jacques Goldman : J'admets. Je ne suis pas un peu méfiant, je suis très méfiant.
Joëlle Lehrer : Est-ce pour cette raison que vous dites dans une autre chanson qu'il vaut mieux de beaucoup se fier aux apparences ?
Jean-Jacques Goldman : Avec le recul du temps, je constate que les apparences sont un langage. Que dans la façon de s'habiller, de se coiffer, de marcher, de battre des yeux, rien n'est innocent. C'est un langage de l'inconscience extrêmement lisible et vrai. En général, la première impression que l'on a de quelqu'un est très exacte.
Le soir illustré, 24 septembre 1998, propos recueillis par Joëlle Lehrer
Patrick Simonin : C'est vrai que vous avez hésité ?
Jean-Jacques Goldman : J'ai hésité, oui. J'avais fait un groupe qui s'appelait Taï Phong et lorsque le groupe a voulu partir en tournée,donc il fallait que j'abandonne mon gagne-pain. J'ai laissé tomber le groupe parce que cela ne me paraissait pas assez sûr. Pour moi, je n'ai jamais été vraiment extrêmement aventurier. Donc, j'avais une femme, j'avais des enfants. Il fallait qu'une personne paie mon loyer à ma place. J'ai vraiment attendu avant d'être sûr de pouvoir vivre de cela.
[S'il suffisait d'aimer - Céline Dion en concert]
Patrick Simonin : Il y a Céline Dion maintenant, il y a Patricia Kaas, il y a Johnny pour qui vous avez composé de formidables chansons. C'est aussi par procuration des succès extraordinaires. C'est difficile de se mettre dans la peau d'une femme, par exemple ? De faire chanter à Patricia Kaas "Je voudrais la connaître" ou "Pour qu'il m'aime encore" [sic] à Céline Dion ?
Jean-Jacques Goldman : Il faut faire des stages. Il faut bien connaître les femmes. Donc je m'y emploie vraiment quotidiennement.
[Je voudrais la connaître - Patricia Kaas]
Jean-Jacques Goldman : Et puis peu à peu, on arrive à savoir comment ça fonctionne. Le "ça" est avec des guillemets. Comment elles fonctionnent, quelles sont leur façon d'être, leur façon de penser.
Laurent Delpech : Dans le livret de ce disque, il y a une phrase : "La vie c'est mieux quand on est amoureux". C'est votre cas. Est-ce que vous êtes un jeune mari heureux ?
Jean-Jacques Goldman : J'espère que c'est le cas de tout le monde. Ça n'a rien à voir avec moi. C'est simplement que quand on arrive à un certain âge, et qu'on a vécu des histoires et des moments, on se rend compte que la vie, elle est bien, mais quand on est amoureux, tout à coup, il y a d'autres couleurs. Et puis quand cet amour s'en va, les couleurs se flétrissent un peu. Ça n'a rien de personnel.
Laurent Delpech : Vous pouvez nous parler un peu de votre femme ? Parce qu'on n'a pas eu beaucoup d'informations sur votre mariage, sur elle, sur vous.
Jean-Jacques Goldman : J'étais marié pendant 25 ans et je n'en ai jamais parlé, alors je ne vais pas commencer aujourd'hui.
Goldman : comme ses pieds (Europe 1, 20 novembre 2001, propos recueillis par Laurent Delpech)
Dominique Simonet : Vous avez écrit et composé "Je voudrais la connaître" pour Patricia Kaas. Comment faites-vous pour vous mettre aussi bien dans la peau d'une femme ?
Jean-Jacques Goldman : Il faut beaucoup, beaucoup étudier le sujet...
Dominique Simonet : Les femmes ?
Jean-Jacques Goldman : Oui, j'y ai passé beaucoup, beaucoup de temps.
Dominique Simonet : Visiblement, les études ont été couronnées de succès...
Jean-Jacques Goldman : Depuis cette chanson pour Patricia Kaas, je peux dire que mon intérêt pour les femmes est professionnel, c'est super... J'ai toujours beaucoup fréquenté les femmes, et je les ai toujours étudiées avec passion, sans lassitude ; c'est une très bonne idée, les femmes. Pour en revenir à cette époque terrible que nous évoquions au début, l'histoire nous montre le sens de l'histoire, c'est-à-dire celui de la libération de la femme. Parce que, partout dans le monde, il y a un rapport historique et géographique entre le statut de la femme et la paix. Cette histoire de femme résout notre problème de révolution. C'est extrêmement simple : partout où la femme a du pouvoir, où l'homme peut le partager et en abandonner, on fait le monde dont on rêve, un monde plus paisible, plus juste, plus tendre.
Eric Jean-Jean : Et bien, justement dans "Les p'tits chapeaux" : "ça m'saoûle", "c'est pas laid", "ça m'pèle", ça c'est des expressions de la fille dont tu es amoureux. "Le monde lui fait pas peur, elle trouve la vie mortelle", "elle met des p'tits chapeaux et moi ça me va", c'est exactement ça. C'est-à-dire que c'est quelqu'un qui n'est pas de ton univers et soudain, tu trouves que tout est génial parce que tu es amoureux.
Jean-Jacques Goldman : Oui, voilà, un exemple… d'un personnage comme ça…
Eric Jean-Jean : C'est pas forcément toi ?
Jean-Jacques Goldman : Qui met des p'tits chapeaux ? Non ! La personne ? Je sais exactement qui c'est. C'est à peu près trois, quatre personnes que j'ai croisées et finalement, ça finit par faire un personnage.
Paroles et musiques (RTL, 15 décembre 2001, propos recueillis par Eric Jean-Jean)
Eric Jean-Jean : C'est toujours comme ça que tu travailles ? Tu m'avais montré une fois le petit carnet que tu as sur toi. Tu l'as toujours ? Tu travailles toujours dessus ?
Jean-Jacques Goldman : Oui.
Eric Jean-Jean : Alors, tu as écrit aujourd'hui ?
Jean-Jacques Goldman : Non, j'ai écrit hier. Hier, j'ai trouvé une super idée !
Eric Jean-Jean : Alors c'est un petit carnet bleu tout petit, un peu plié par la poche du jean.
Jean-Jacques Goldman : Ben ouais…
Eric Jean-Jean : Un petit carnet Clairefontaine. Tu ne veux pas nous la dire, ta super idée ?
Jean-Jacques Goldman : En fait, c'est une femme qui parle, une maîtresse. Et elle dit, pour elle, pour l'autre, il y a la fête de Noël, il y a les dîners en famille, il y a les enfants, la belle maison, il y a la voiture… et pour moi il y a les hôtels entre 20h et 22h et tout ça… mais il y a aussi les étreintes et puis il y a aussi la solitude, le premier de l'an, tout ça… Un peu le parallèle entre ces deux femmes, je ne sais pas si ça fera une chanson un jour…
Eric Jean-Jean : C'est le pendant de "Je voudrais la connaître" en fait. "Je voudrais la connaître", c'était l'officielle !
Jean-Jacques Goldman : Oui, mais "Je voudrais la connaître", ce n'est pas tout à fait la même chose, c'est la femme délaissée qui voudrait connaître la nouvelle. Là, c'est plutôt, est-ce que finalement, la gagnante est celle qu'on croit ? Est-ce que c'est celle qui, le dimanche, le samedi, va au supermarché et le dimanche va chez ses beaux-parents ou est ce que c'est celle qui le retrouve comme ça, une heure volée ou deux heures comme ça dans un petit hôtel, où c'est intense, je ne sais pas…
Eric Jean-Jean : Comment ça naît une chanson ? C'est peut être une question qu'on t'a beaucoup posée…
Jean-Jacques Goldman : En rencontrant, en lisant, en écoutant parler….
Eric Jean-Jean : Je discutais avec Patricia Kaas, qu'on a reçue il n'y a pas très longtemps dans cette même émission qui disait : "Goldman, il m'a pigée très vite".
Jean-Jacques Goldman : Oui, oui.
Eric Jean-Jean : Tu l'as observée ?
Jean-Jacques Goldman : Oui… Elle est très attachante, j'aime bien comme elle est dure. Elle n'est pas du tout insensible, mais elle est dure au mal. Moi, j'aime ça, c'est ce qui m'a vraiment plu chez elle.
Eric Jean-Jean : Elle nous a fait une belle déclaration à ton sujet en disant : "à moins qu'on se fâche, ce qui m'étonnerait vraiment, je ne vois pas comment je pourrais faire une fois dans ma vie, un album sans Jean-Jacques Goldman".
Jean-Jacques Goldman : Ah bon ? C'est super gentil !
Paroles et musiques (RTL, 15 décembre 2001, propos recueillis par Eric Jean-Jean)
Eric Jean-Jean : La sensation que tu préfères ou que tu détestes ?
Jean-Jacques Goldman : Je vais être nul… La sensation que je préfère, c'est une femme, quand même. C'est ce qu'il y a de plus fort. Et que je déteste ? Un homme, mais je n'ai jamais essayé ! [rires]
Paroles et musiques (RTL, 15 décembre 2001, propos recueillis par Eric Jean-Jean)
Damien : Par rapport au titre "Je voudrais vous revoir", quelle a été la base de l'inspiration ?
Jean-Jacques Goldman : Sur le plan du texte aussi ?
Damien : Oui.
Jean-Jacques Goldman : Moi je trouve c'est… [silence] J'allais dire, ce n'est pas loin de "Confidentiel"… L'idée, plus que de quelqu'un qui écrit une lettre pour revoir quelqu'un, c'est l'idée de se dire qu'il faut vénérer ce qui a été vécu, quoi. Et voilà. C'est toujours cette idée, même si ça s'est plus ou moins bien passé, il y a peut-être eu un autre déclic. J'avoue, je ne m'en souviens pas précisément. Mais en tout cas, l'idée de base c'est ça et, par exemple, la phrase : "Je voudrais nous revoir", à la fin, c'est une phrase qui vient dans l'écriture, quoi. C'est comme dans "Quand tu danses" : "Que deviennent les amoureux perdus ?" et, à la fin : "Que deviennent les amours éperdues ?", ça, ce ne sont pas des choses qui sont déterminées. Ça fait partie des surprises de l'écriture. C'est-à-dire, tout à coup, il y a cette évidence-là qui vient. Et qu'à la fin, le gars dise que c'est lui qu'il veut revoir, finalement, quand il était jeune à travers le regard de cette femme, ce n'est pas prémédité. C'est en écrivant que tout à coup, ça devient une évidence.
Géraldine : Dans les "Petits chapeaux", dont vous dites affectionner le texte, vous dites, je vous cite : "Elle ramasse les paumés, tout ce qui traîne, les vieux, les chats, dans le tas, y'avait moi". Alors vous vous considérez comme un vieux ou comme un chat ?
Jean-Jacques Goldman : Un peu comme les deux [rires]. Il se trouve que quand j'étais scout, on donne un nom d'animal, ça s'appelle la totémisation, et moi, on m'avait appelé Kafra, qui est une espèce de chat sauvage, à mon avis pas en très bonne santé [rires]. Il doit y avoir quelque chose.
Jean-Jacques Goldman : [à propos de sa chanson "Petite fille"] Je trouve que tout ce qui se passe dans le monde ne fait qu'accréditer cette idée que plus les sociétés donnent du pouvoir aux femmes, et plus ces sociétés sont paisibles et, je ne pense pas qu'il y ait de possibilité de paix où que ce soit, lorsque le pouvoir n'appartient qu'aux hommes. Il me semble que le seul combat, semble-t-il politique, qu'on devrait faire, c'est sur l'accession de la femme au pouvoir, enfin, pas au- dessus des hommes, mais à cette égalité. Je crois que les hommes sont absolument incapables de faire la paix ensemble et même, je crois que la guerre les amuse un peu.
Sacha Reins : Vous êtes égratigné par la presse, qui vous reproche votre manque de communication. Qu'est-ce qui vous agace le plus dans ce que vous pouvez lire sur vous ?
Jean-Jacques Goldman : Que l'on pense que je me mets en retrait vis-à- vis des médias pour des raisons de marketing. Que tout ce que je fais est calculé, même ma façon de m'habiller. Je marche complètement à l'instinct, sans aucun calcul. Sans stratégie, surtout en ce qui concerne la télé, que je fréquente peu. Cela ne m'ennuie pas de faire de la télé, mais je suis quand même mieux chez moi.
Sacha Reins : Que faites-vous de l'argent que vous gagnez ?
Jean-Jacques Goldman : Rien de spectaculaire. Je vis comme un cadre moyen. Je me suis offert une très grande maison à Paris, mais je vis en fait avec ma femme dans un trois-pièces à Marseille.
Sacha Reins : Pourquoi ?
Jean-Jacques Goldman : Parce que c'est là qu'elle fait ses études et que c'est avec elle que je me sens bien.
Je marche à l'instinct (Journal du Dimanche, le 29 avril 2002, propos recueillis par Sacha Reins)
Pierre Chatard : Dans la chanson "On n'y peut rien", quand tu écris "Et on résiste , on bâtit des murs, des bonheurs, photos bien rangées", cela veut dire qu'on ne peut rien face à l'amour ?
Jean-Jacques Goldman : C'est juste qu'à un moment on se dit "Bon allez, là, il faut que je sois sérieux… Ha ! Quand même ! Je ne vais pas tout quitter, j'ai des enfants, une maison…" et tout à coup, voilà, le truc arrive… Ou alors dans l'autre sens, tout à coup l'amour s'en va, on ne sait pas trop pourquoi, et on n'y peut rien.
Pierre Chatard : Les conventions, les manières en amour, ça t'énerve ?
Jean-Jacques Goldman : Je trouve ça dommage ! Si on peut mettre des conventions partout, pas en Amour ! Je trouve que c'est super dommage de vivre des choses conventionnelles, forcées et raisonnables dans les relations amoureuses, ça veut dire qu'on ne les vit pas, en fait.
Pierre Chatard : Statistiquement, deux tiers des mariages se terminent par un divorce dans les grandes villes. Pourquoi tant de désillusions ?
Jean-Jacques Goldman : C'est surtout parce que maintenant, on parle d'amour ! C'est clair que du temps de nos grands-parents, l'idée d'amour dans le mariage n'existait pas, c'est-à-dire qu'on voyait des petites annonces dans un journal qui s'appelait "Le chasseur Français" où la femme mettait "cherche homme ne buvant pas" ! Là, la création de la famille était utilitaire, il y a avait un homme qui avait besoin d'une femme chez lui, pour faire la cuisine et des enfants, il y avait une femme qui avait besoin d'un homme qui travaille, l'amour était tout à fait subsidiaire. Il y avait les petites danseuses, il y avait des femmes pour ça. Maintenant, on est devenu beaucoup plus exigeant et par contre on ne vit que des histoires d'amour, même si c'est le prix des divorces. Et d'ailleurs, ça ne dure pas beaucoup moins longtemps, parce qu'avant, les gens mouraient jeunes, vers 40 ans. Ils faisaient 20 ans de couples. Maintenant, on fait souvent 7, 10 ou 15 ans et c'est déjà pas mal, quoi… Mais on peut le faire plusieurs fois [rires].
Pierre Chatard : Selon toi, la fidélité doit être le ciment du couple ?
Jean-Jacques Goldman : Chacun son truc. Je pense que ça peut l'être. Ça dépend vraiment des contrats passés. Moi, je pense que quand on se marie à 20 ans, qu'on a une espérance de vie de 84, 85 ans, et bien je trouve ça un peu dommage, quoi ! [rires]. Mais, bon, on peut vraiment s'éclater dans le cadre du couple. Tant mieux pour ceux qui y arrivent !
Interview de Jean-Jacques Goldman (MusiConnexion, mai 2002, propos recueillis par Pierre Chatard)
Eric Saya : Dans "Tournent les violons", tu racontes l'histoire d'un malentendu entre une jeune fille et un seigneur. La jeune fille attend toute sa vie un amour qui ne viendra jamais. Lorsque tu parlais des femmes dans tes chansons, elles ont souvent eu une attitude souvent passéiste comme dans "La vie par procuration", "Elle attend", "Il me dit que je suis belle", "En attendant ses pas". Est-ce que c'est vraiment un constat ?
Jean-Jacques Goldman : Là, il s'agit d'un constat que tu fais toi- même, car j'avoue que je n'analyse pas trop mes chansons, mais c'est vrai. Je suis beaucoup touché par ces femmes qui rêvent. Je ne dis pas qu'elles me plaisent forcément, mais ce sont des personnages qui me touchent, surtout le côté "je vivrai plus tard".
Sans limites : Jean-Jacques Goldman (Radio Kol Hachalom, juin 2022, propos recueillis par Eric Saya)